Le conseil d’administration du FMI achève les consultations de 2019 au titre de l’article IV avec Haïti

le 29 janvier 2020

Le 24 janvier 2020, le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a achevé les consultations de 2019 au titre de l’article IV avec Haïti.

Depuis mars 2019, Haïti fait face à une longue crise politique et à des troubles civils prolongés qui ont parfois stoppé la majeure partie de l’activité économique dans le pays. La crise a eu des conséquences néfastes sur l’économie et la population déjà vulnérable : l’inflation a dépassé 20 % sur un an en septembre, la production s’est contractée de 1,2 % selon les estimations pendant l’exercice budgétaire 2019 (qui a pris fin le 30 septembre) et la monnaie s’est dépréciée de 25 % sur la même période. Comme les recettes budgétaires se sont effondrées et que le coût des subventions énergétiques a augmenté, le déficit budgétaire s’est creusé pour atteindre 3,8 % du PIB pour l’exercice 2019 et les arriérés intérieurs ont augmenté nettement. Le ratio dette publique/PIB est monté de 40 % à 47 % sur l’exercice.

Les autorités déploient des efforts considérables pour limiter cette détérioration. Le ministère des Finances met en œuvre des mesures visant à améliorer la perception des recettes et à mieux maîtriser les dépenses, et, en novembre, a signé un nouvel accord avec la banque centrale afin de renforcer la discipline budgétaire et de limiter le financement monétaire de l’État. La banque centrale a ajusté ses taux d’intérêt afin de contenir l’inflation tout en cherchant à soutenir le secteur privé pendant la récession.

Faute d’une mise en œuvre soutenue de bonnes politiques et de vastes réformes, les perspectives restent moroses. Selon le scénario de base qui suppose une stabilisation politique en 2020 sans réformes politiques ou économiques majeures, la croissance s’accélérerait, mais resterait négative cette année et inférieure à 1,5 % à moyen terme. L’inflation devrait fléchir légèrement avant de finir par tomber en deçà de 10 % d’ici 2025. Les perspectives risquent plutôt d’être révisées à la baisse, mais la stabilité politique pourrait constituer un facteur d’amélioration important. Une résolution de la crise actuelle, la nomination d’un nouveau gouvernement déterminé et capable de mettre en œuvre des réformes, et le retour de l’aide de la communauté internationale pourraient entraîner une hausse de l’investissement et une accélération de la croissance potentielle.

Évaluation par le conseil d’administration [1] [2]

Les administrateurs souscrivent à l’orientation générale de l’évaluation effectuée par les services du FMI. Ils expriment leur préoccupation devant la crise socio-politique et soulignent qu’il est urgent de rétablir la stabilité politique et macroéconomique, de s’attaquer à la pauvreté et aux inégalités, ainsi que de combattre la corruption. Ils appellent toutes les parties prenantes à chercher à établir un large dialogue national afin de s’attaquer aux problèmes gigantesques du pays et de réaliser le potentiel d’une croissance bien plus vigoureuse et plus inclusive. Les administrateurs encouragent à continuer de coopérer étroitement avec les donateurs et le FMI, notamment par le biais de l’assistance technique, et saluent la stratégie qui constituera la base de l’accompagnement futur par le FMI.

Les administrateurs soulignent que les fortes contraintes budgétaires nécessitent de déplacer les rares ressources des dépenses non prioritaires vers les programmes sociaux et l’investissement. Ils soulignent qu’il est important de limiter le financement monétaire du déficit budgétaire et de préparer un budget notionnel pour l’exercice 2020. Les administrateurs encouragent les autorités à privilégier des mesures visant à accroître les recettes intérieures et à réduire les exemptions à court terme, tout en cherchant à renforcer l’administration de l’impôt, à préparer un plan de règlement des arriérés budgétaires et à renforcer la gestion des finances publiques. Les administrateurs saluent les progrès accomplis par les autorités en ce qui concerne le nouveau plan national de protection sociale, et soulignent qu’il est nécessaire d’en accélérer l’approbation et de mettre l’accent sur un nombre limité de programmes de transferts en espèces.

Les administrateurs soulignent qu’il est urgent de mettre à jour les priorités de la lutte contre la corruption, notamment en établissant le comité directeur envisagé dans la stratégie de 2009. Ils soulignent aussi qu’il est nécessaire d’appliquer le système de déclaration du patrimoine et de mener des audits réguliers des entreprises et autres entités publiques.

Les administrateurs encouragent les autorités à laisser le taux de change s’ajuster de manière ordonnée. Ils recommandent d’établir un objectif monétaire quantitatif et encouragent les autorités monétaires à faire avancer les autres réformes institutionnelles. Les administrateurs saluent les efforts déployés par la banque centrale pour continuer de développer l’intermédiation et l’inclusion financières, notamment au moyen des fintech.

Les administrateurs soulignent qu’il sera crucial de bien échelonner la réforme du secteur de l’énergie pour assurer la viabilité des finances publiques et accélérer la croissance : la réforme doit s’accompagner d’une communication claire et de mesures qui en atténuent l’impact sur les groupes vulnérables. Ils encouragent les autorités à réformer la gestion et la performance de l’Électricité d’Haïti, à collaborer avec les parties prenantes pour réduire les coûts de l’électricité, à améliorer la fiabilité et l’efficience de l’approvisionnement en énergie et à réduire la charge budgétaire qui s’y rapporte. Il est nécessaire d’opérer des réformes structurelles plus générales pour améliorer la compétitivité de l’économie : il s’agit notamment de simplifier les réglementations, d’éliminer les goulets d’étranglement dans les infrastructures, de renforcer les droits de propriété et d’améliorer la gouvernance. Il est prioritaire aussi d’accroître la résilience face aux catastrophes naturelles.

Les administrateurs engagent les autorités à prendre des mesures pour améliorer la qualité et le délai de production des données économiques, en continuant de s’appuyer sur l’assistance technique du FMI.



Haïti : principaux indicateurs économiques et financiers, 20161

PIB nominal (2018) : 9,7 milliards $

PIB par habitant (2018) : 890 $

Population (2016) : 10,847 millions

Proportion de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté (2012) : 58

Estimations

Projections

2017

2018

2019

2020

2021

Production

Croissance du PIB réel (%)

1,2

1,5

-1,2

-0,4

0,9

Emploi

Chômage (%)

Prix

Inflation (fin de période) (%)

15,4

13,3

20,1

17,5

14,5

Finances de l’administration centrale

(en pourcentage du PIB, sauf indication contraire)

Recettes et dons

17,7

17,3

13,6

13,4

14,2

Recettes intérieures

14,0

13,0

10,8

10,0

11,1

Dons

3,7

4,3

2,8

3,4

3,0

Dépenses

17,5

19,0

16,1

15,6

16,2

Dépenses courantes

12,2

12,7

12,5

11,5

11,4

Dépenses en capital

5,3

6,2

3,6

4,1

4,8

Solde global du secteur public non financier, dons compris 2

-0,9

-2,9

-3,8

-3,4

-3,1

Dette totale du secteur public

38,3

39,9

47,0

46,1

44,9

Monnaie et crédit

Monnaie au sens large (variation en %)

12,9

13,7

18,9

18,6

17,0

Crédit au secteur privé (variation en %)

4,5

12,5

9,9

14,6

17,0

Taux d’intérêt bons BRH à 3 mois (%)

12,0

12,0

22,0

19,4

16,4

Balance des paiements

(en pourcentage du PIB, sauf indication contraire)

Solde des transactions extérieures courantes (dons officiels compris)

-1,0

-3,9

-2,0

-0,9

-1,1

Solde des transactions extérieures courantes (dons officiels exclus)

-5,6

-7,9

-4,8

-3,2

-4,1

Investissement direct étranger

4,5

1,1

0,9

0,9

1,3

Réserves (en mois d'importations de l’année suivante)

4,4

4,7

4,9

4,8

4,8

Dette publique extérieure

24,2

23,5

27,4

25,4

24. 2

Taux de change

Taux de change réel effectif (variation en %) (+ = appréciation)

12,7

2,8

-10,8

PIB nominal (en millions de gourdes)

551 911

631 829

732 545

868 582

1 015 809

PIB nominal (en millions de dollars)

8 409

9 658

8 708

8 533

8 842

Sources : Ministère de l’Économie et des Finances, Banque de la République d’Haïti, estimations et projections des services du FMI.

1 L’exercice budgétaire se termine le 30 septembre.

2 Y compris transferts à l’EDH.



[1] À l'issue des délibérations, la directrice générale, en qualité de présidente du conseil d'administration, résume les opinions des administrateurs, et ce résumé est communiqué aux autorités du pays. On trouvera une explication des termes convenus utilisés communément dans les résumés des délibérations du conseil d'administration à l’adresse : http://0-www-imf-org.library.svsu.edu/external/np/sec/misc/qualifiers.htm.

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